Le retour du Castor en Europe
Autrefois très présent en Europe et en Asie, le Castor européen (ou Castor fiber) a bien failli voir son nom s’ajouter à la liste des espèces disparues. Chassé pour sa chair et sa fourrure, il était également convoité pour le castoreum, une substance sécrétée au niveau des glandes sexuelles de l’animal et réputée pour ses vertus médicinales.
Accusé de provoquer des inondations en édifiant des barrages sur les cours d’eau, ses activités de construction ont contribué à le rendre impopulaire. Aujourd’hui, grâce à l’adoption de mesures de conservation et à une série de réintroductions, les populations de castors sont de retour en France et en Europe.
Portrait du Castor d’Europe
Une morphologie adaptée à la vie en milieu aquatique et boisé
Le Castor européen, ou Castor fiber, est le plus gros rongeur d’Europe. Les adultes possèdent un corps trapu et mesurent plus d’un mètre de long, certains pouvant atteindre 1 m 40.
Le castor européen est morphologiquement très semblable à son cousin le castor d’Amérique du Nord (Castor canadensis), même si ce dernier apparaît légèrement plus massif et lourd. Seul un examen chromosomique permet de les différencier avec fiabilité : le castor européen possède 48 chromosomes contre 40 chromosomes pour son homologue américain.
Le castor est parfaitement adapté à la vie semi-aquatique. Son pelage dense (12 000 à 23 000 poils/cm2) est imperméable. Les poils les plus courts, appelés poils de bourre, lui confèrent une isolation thermique ; tandis que les poils les plus longs, les jarres, permettent de faciliter l’écoulement de l’eau.
Pour communiquer entre eux, les castors utilisent un répertoire sonore varié : cris, murmures, gémissements…
Dans certaines tribus indiennes, ils sont surnommés « les petits frères qui parlent ».
Ses pattes arrières, palmées, lui permettent de se propulser dans l’eau et en font un excellent nageur. Le castor a une tête aplatie avec les yeux, les oreilles et les narines disposées très haut sur le crâne. Ces particularités anatomiques lui permettent de nager tout en conservant les fonctionnalités de la vue, de l’ouïe et de l’odorat.
Le castor possède vingt dents, parmi lesquelles quatre puissantes incisives. Très tranchantes, elles lui permettent de ronger l’écorce des arbres, de couper des jeunes tiges et même de s’attaquer à des troncs de diamètre important.
La queue du castor est certainement l’élément le plus remarquable de sa morphologie. Elle est à l’origine de nombreuses légendes : d’après certaines croyances, le castor s’en servirait comme d’une scie pour couper des branches, ou encore comme d’une masse pour enfoncer des pieux ! En réalité, l’animal l’utilise comme un gouvernail lorsqu’il nage et s’en sert pour avertir ses congénères d’un danger en frappant bruyamment la surface de l’eau.
Un régime exclusivement végétarien
Contrairement aux idées reçues, le castor ne se nourrit pas de poissons ; il est exclusivement végétarien. Son régime alimentaire est principalement à base d’écorce d’arbre (il consomme environ 700 g d’écorce par jour).
Les castors consomment également des plantes herbacées, des feuilles et des plantes aquatiques. Ils peuvent aussi prélever de la nourriture dans des champs de céréales ou des jardins potagers lorsqu’ils sont situés dans un rayon d’une dizaine de mètres autour de leurs terriers.
Astucieux, le castor a une stratégie pour conserver des réserves alimentaires durant la période hivernale. A la fin de l’été, il coupe et assemble des branches pour former des radeaux, qu’il amarre ensuite au fond de l’eau. Il conserve ainsi une réserve de végétation au frais pendant tout l’hiver.
La vie en famille
Le modèle social des castors est basé sur un groupe familial composé de deux parents et de leurs enfants. Les castors sont monogames et, sauf en période d’accouplement, c’est la femelle adulte qui gère l’emploi du temps de la famille et endosse le rôle de chef de clan.
Les castors habitent dans des terriers aménagés dans les berges des cours d’eau. Si les berges sont trop basses pour y installer des terriers, ils construisent des huttes à base de branchages.
Le castor est un bâtisseur infatigable ! Il passe une grande partie de ses journées à abattre des arbres pour construire des barrages. La fonction première de ces ouvrages est de maintenir la hauteur d’eau à un niveau suffisant pour conserver l’entrée du terrier complètement immergée.
Importance écologique
Les activités de construction du castor ont de nombreuses conséquences indirectes. Leurs barrages peuvent être à l’origine de débordements des cours d’eau, provoquant la colère des riverains.
Mais c’est oublier qu’en créant et en maintenant des habitats humides, les castors permettent le développement d’un grand nombre d’espèces végétales et animales (libellules, poissons, amphibiens, ou d’autres mammifères aquatiques tels que la loutre).
Les écologues considèrent le castor comme une espèce « clé de voûte » (« keystone species » en anglais), c’est-à-dire une espèce qui a un fort impact sur son environnement comparativement à ses effectifs ou à sa biomasse.
Une espèce qui a failli disparaître
Une histoire mouvementée
Auparavant très répandu en Europe et en Asie, le Castor d’Europe a bien failli disparaître à cause de l’avidité des hommes. Chassé pour sa fourrure et sa viande réputées, mais également pour son précieux castoréum*, le castor a également subi des dégradations toujours plus importantes de son habitat naturel.
Si bien qu’au début du 20ème siècle, on ne dénombrait plus que 1 200 individus dans toute l’Europe, et l’espèce était considérée comme éteinte en France.
*castoréum : substance sécrétée au niveau des glandes sexuelles de l’animal, réputée pour ses vertus médicinales et cosmétiques (utilisée en parfumerie notamment).
Actions de conservation et recolonisation progressive
En France, à partir de 1909, des mesures de protection ont été mises en place dans la vallée du Rhône. Par la suite, plus d’une vingtaine d’opérations de réintroduction ont été réalisées sur le territoire français. On estime aujourd’hui la population de castors à plus de 14 000 individus en France. Elle se répartit en majorité autour des bassins de la Loire, du Rhône et de la Meuse.
Des initiatives similaires ont été menées dans plusieurs pays d’Europe, comme en Allemagne, aux Pays-Bas, ou encore au Royaume-Uni. En Ecosse par exemple, où l’espèce était également considérée comme éteinte, une réintroduction couplée à un suivi scientifique est en cours pour une durée de 5 ans dans la forêt de Knapdale, en Argyll (région du sud-ouest de l’Ecosse).
Depuis 1981, le castor européen est protégé par la législation française qui interdit entre autres sa capture, sa détention, sa commercialisation et sa destruction. L’arrêté ministériel du 23 avril 2007 va plus loin, en protégeant le milieu de vie de l’animal. Au niveau européen, le castor figure à l’annexe III de la convention de Berne, et aux annexes II et IV de la directive Habitats, Faune et Flore.
Grâce aux mesures de conservation adoptées par plusieurs pays européens, le castor d’Europe recolonise progressivement les territoires qu’il occupait autrefois. Il est ainsi passé du statut d’espèce éteinte à celui de « préoccupation mineure » d’après la Liste rouge de l’UICN (Union internationale pour la conservation de la nature). L’espèce reste cependant menacée par le cloisonnement des populations et la destruction de son habitat du fait de l’urbanisation, ainsi que par le développement d’espèces invasives.
Le mot de Charles l’ornithorynque
En l’absence d’actions de conservation, nos amis les castors auraient bel et bien pu disparaître… Cela fait froid dans le dos ! Et que serait-il advenu du Père Castor ?
Sources :
Ernie est le hérisson servant de mascotte publicitaire à la marque d’éponge SPONTEX depuis 1999. Je leur avais suggéré de parrainer des associations de défense de ce charmant animal, comme le Hameau ou le Sanctuaire des Hérissons. Ou financer des panneaux de signalisation et des tunnels de passage routiers souterrains pour leur protection. Le service consommateur s’est borné à me répondre que son rôle (commercial) se limitait à faire connaître, et subsidiairement à faire aimer, cette espèce, par l’intermédiaire de sa communication publicitaire!
Vous pouvez aussi consulter des médias animaliers comme: La Gazette Animale et Planète Animaux.