Les rennes du Père Noël
Comme tous les ans, dans la nuit du 24 au 25 décembre, on raconte que le Père Noël a préparé son traîneau pour la distribution des cadeaux aux enfants. Il y aurait soigneusement attelé ses rennes, afin que ces derniers le conduisent vaillamment d’une cheminée à l’autre pour y déposer les présents.
Le Journal des animaux vous invite à découvrir l’histoire de cette légende, et à en apprendre davantage sur ces animaux qui ont inspiré Rodolphe, le célèbre renne au nez rouge.
Héros de contes
Les traces de l’implication des rennes dans la distribution des cadeaux aux enfants pour Noël ont été consignées par l’américain Clement Clarke Moore, dans un poème composé en 1823 et intitulé A Visit from St. Nicholas (« Une visite de Saint-Nicolas »), aussi connu sous le nom de The Night before Christmas (« La nuit avant Noël »). Le texte met en scène Saint Nicolas, appelé Saint Nick, qui n’est autre que celui que l’on appelle aussi Santa Claus ou Père Noël. En voici un extrait :
(…) La lune au cœur de la neige fraîchement tombée
Donnait l’éclat du jour aux objets au-dessous,
Quand, devant mes yeux émerveillés apparut
Seulement un traîneau miniature et huit minuscules rennes,
Avec un petit conducteur, vieux mais vif et plein d’entrain,
Je sus en un instant que c’était saint Nicolas.
Aussi rapides que des aigles, ses coursiers bondissaient,
Et il sifflait, et il criait, et les appelait par leur nom ;
« Bien Tornade !, bien Danseur !, bien Furie et Fringant !
Allez Comète !, allez Cupidon !, allez Tonnerre et Éclair !
En haut du porche !, en haut du mur !
Maintenant, filez au loin ! Filez au loin ! Filez au loin tous ! »
Comme les feuilles sèches volant devant l’ouragan,
Quand elles approchaient d’un obstacle, montent dans le ciel,
Au-dessus des toits des maisons, les coursiers volaient,
Emportant le traîneau rempli de jouets et saint Nicolas avec. (…)
Huit rennes étaient alors recensés pour l’attelage du Père Noël. Mais aujourd’hui c’est un neuvième renne, Rodolphe (ou Rudolph(e) selon les orthographes), qui est davantage reconnu dans l’imaginaire collectif. Son histoire a été racontée en chanson par Gene Autry en 1949. Des dessins animés lui ont également été spécialement consacrés depuis cette époque.
La vie en milieu arctique
Le lieu de résidence officiel du Père Noël et de ses rennes est aujourd’hui établi en Laponie, dans le village de Rovaniemi en Finlande. Des familles du monde entier s’y rendent en visite chaque année.
En France et au Canada, des secrétariats du Père Noël répondent chaque année aux lettres qui lui sont adressées.
Ces personnages de légende sont directement inspirés des véritables rennes, aussi appelés caribous au Canada, qui appartiennent à l’espèce Rangifer tarandus selon la classification scientifique. Les rennes habitent dans les régions qui comptent parmi les plus froides du globe : on les trouve dans les milieux de toundra en Russie, en Europe du Nord et plus précisément en Finlande, Suède et Norvège, ainsi qu’en Amérique du Nord.
L’Union internationale pour la conservation de la nature classe toutefois les rennes parmi les espèces vulnérables, la concurrence des activités humaines et le braconnage représentant les principales menaces pour ces animaux.
Dans les zones d’habitat des rennes, les hivers sont longs et froids, avec des températures situées en moyenne entre -10°C et -20°C, pouvant chuter jusqu’à -30°C. La saison d’été y est courte, avec des températures fraîches par rapport au climat que nous connaissons sur le continent français (10 à 15°C).
Les rennes ont développé des caractéristiques qui leur permettent d’évoluer avec aisance dans ces conditions difficiles. Leur pelage permet au corps de conserver sa chaleur : il est composé de poils de « bourre », très denses, ainsi que de poils de « jarre », plus longs, et qui possèdent la particularité d’être creux. Cela leur confère un fort pouvoir isolant, y compris lorsque le renne doit nager dans les eaux très froides de ces régions.
Les sabots des rennes sont longs et larges ; ils peuvent s’écarter de façon à faciliter la marche sur de la neige poudreuse afin d’augmenter la surface d’appui. Enfin, le bord des sabots antérieurs est coupant, ce qui permet aux rennes de creuser des trous dans la neige pour se nourrir (qui peuvent atteindre 1,50 mètre de profondeur !).
Une ramure majestueuse
Les mâles comme les femelles portent des bois sur leur tête. Ceux des mâles sont plus volumineux que ceux des femelles.
Toutefois, ils tombent à partir de la mi-novembre pour ne repousser qu’au mois de mars, alors que les bois des femelles restent en place durant l’hiver et tombent au printemps.
Dans les récits de fiction, les rennes du Père Noël qui tirent le traîneau sont toujours représentés avec une ramure : il s’agirait donc de femelles ! Bien que leur envergure généralement imposante rappelle davantage les attributs des mâles…
Un peu de magie…
Si la capacité des rennes à s’envoler dans les airs en tirant un traîneau n’a pas été démontrée par les scientifiques jusqu’à présent, de récentes études ont en revanche mis en évidence des capacités d’adaptation visuelles impressionnantes et inédites dans le règne animal.
Tout d’abord, il a été observé que les rennes sont capables de percevoir la lumière ultraviolette. Cela leur permettrait de mieux détecter la végétation dont ils se nourrissent, en particulier le lichen, dans les situations de faible luminosité lors de la période hivernale. Cette capacité à détecter les ultraviolets est assez fréquente chez les animaux – seuls l’humain et quelques mammifères en seraient dépourvus – et ne représente pas une originalité en soi.
En revanche, une nouvelle étude conduite en 2013 a permis d’identifier une faculté qui n’a été observée chez aucun autre animal à ce jour : les rennes modifient la couleur de leurs yeux en fonction des saisons ! L’été, lorsque la luminosité est forte du fait de la réverbération des rayons du soleil sur la neige, les yeux des rennes sont d’un intense brun-doré. Mais l’hiver, lorsque la nuit domine, ils deviennent d’un bleu profond. Comme par magie.
Ce changement de couleur vers le bleu s’accompagne d’une augmentation de la pression de l’oeil et d’une modification de la longueur des ondes lumineuses réfléchies par les tissus cellulaires de la rétine. Les rennes verraient alors plus flou durant cette période, mais auraient davantage de facilité à détecter les mouvements de leurs prédateurs dans l’obscurité de la nuit arctique. L’équipe de chercheurs qui a découvert ce phénomène indique qu’il s’agit, à leur connaissance, de la première description d’une adaptation structurelle rétinienne aux variations saisonnières de la lumière ambiante.
Les rennes nous réservent ainsi bien des surprises !
Mes amis les rennes se joignent à moi, ainsi qu’à l’équipe du JDA, pour vous souhaiter une excellente année 2019 !
Sources :
- Mémoires de thèse présentés aux écoles nationales vétérinaires de Lyon en 2007 et d’Alfort en 2015
- Musée canadien de la nature
- Sciences et avenir
- The Royal society publishing
- JSTOR
- International Union for Conservation of Nature (IUCN)